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Avant de mourir une dernière fois

La précision, la langue de Jean-François Zimmermann, le plaisir de décrire l’atmosphère d’une époque, sont les mêmes que dans Rendez-vous au Pré-aux-Clercs, Le Roi des Halles ou Les 4 sorcières de Bouvignies. Sauf que cette fois, il ne s’agit pas d’un roman historique. Ce n’est pas non plus ce genre d’autofiction si à la mode d’aujourd’hui ni même un récit de vie.

Non, c’est un livre essentiel, vital, nécessaire. En bandeau de l’ouvrage Avant de mourir une dernière fois, une confidence de l’auteur : « Maman, il est temps de régler nos comptes. »

Jean-François Zimmermann peut être chirurgical dans la férocité. « Il ne fallait pas humilier mon père / Il ne fallait pas écarter tes cuisses au passage du premier chat de gouttière. / Il ne fallait pas miauler en laissant la porte ouverte de la chambre à coucher. / (…) Je suis la victime d’un père alcoolique et d’une mère volage. »

Ce fils, que la mère trimballait en laisse comme la petite chienne dont elle avait raccourci la queue « par une lame tranchante », reprend par l’écriture le pouvoir sur une enfance volée. Mais nous ne sommes pas sur le divan du psychanalyste. Par la distance prise, par l’humour qui tombe souvent à pic, l’ouvrage est un véritable roman selon la définition du dictionnaire : « Une œuvre qui fait vivre dans un milieu des personnages donnés comme réels, fait connaître leur psychologie, leur destin, leurs aventures. »
Le milieu, c’est l’après-guerre puis les Trente Glorieuses : les vacances chez la
grand-mère à Bénifontaine dans le Pas-de-Calais, l’appartement parisien, un début d’ascension sociale vite annihilé par les démons intérieurs des adultes, les institutions de curés à vous faire perdre à tout jamais la foi, la Bretagne écartelée entre ses traditions et un tourisme naissant, le trait de côte qui déjà diminue, l’évolution des cylindrées de voitures, les premières mobylettes pour ados, les rêves de Bob Morane.

Même si les histoires ne sont pas les mêmes, chaque lecteur, à un moment ou un autre, peut se retrouver dans ce récit intimiste et contemporain.

En sortant de sa zone de confort, en allant au plus profond de lui-même et au plus loin de son aventure d’écriture, Jean-François Zimmermann touche au plus près.

Avant de mourir une dernière fois
Jean-François Zimmermann. Lucie CEP Editions. 167 pages. Prix 18 euros.
ISBN : 978-2-494314-24-5

Hervé LEROY


Mille battements d’ailes

Loïc et Diane ne se comprennent plus : leur vie en région parisienne leur échappe, leur relation se tend. De leur côté, Jade et Victor, frère de Diane, aspirent à une existence qui donne plus de place à la douceur, à la sobriété, au partage. Leur cousin Stéphane, qui habite le Jura, accueille Pavel et Ivana, en exil, ce qui crée un bouleversement aux répercussions en cascade.

En une galerie de personnages variés, qui forment une famille aux multiples facettes, Saverio Tomasella brosse le portrait d’une petite société, dont le dénominateur commun est le désir de mettre en place des changements, comme autant de battements d’ailes de papillons, pour faire changer le monde.

Collaborant dans leur volonté de construire ce monde nouveau, ils osent alors entreprendre le virage qu’ils n’osaient envisager au fond d’eux-mêmes. Grâce aux autres, ils deviennent libres et audacieux de bâtir une société qui ressemble à leurs valeurs.

« Mille battements d’ailes »
de Saverio TOMASELLA Ed. Robert Laffont – 272 pages – 19 €


Le lac au miroir

Odile Lefranc termine son premier roman par la parole d’un vieil Occidental « ce qui va créer la vie, c’est le désir ». C’est bien un désir réel qui empoigne le lecteur de cette histoire : celui de partir à la découverte de l’île de Bali et d’un peintre allemand Walter Spies qui traverse le récit.

La plume de la romancière est celle d’une artiste dans sa façon de décrire les paysages de cette île Indonésienne qui l’a envoutée, et de retracer un tableau disparu, mémoire de son enfance. Mais c’est un halo de gris et de noir, peu à peu traversé d’éclats de couleur, qu’elle choisit pour entourer le visage de sa mère, décédée en emportant la clef d’un mystère qui lui a empoisonné l’existence.

Ce roman pose la question du secret de famille : celui que l’on essaie de cacher car on en a honte, sans prendre conscience que le silence n’est jamais totalement opaque et que s’y glisse alors pour les générations qui suivent, un imaginaire tissé d’erreurs et de souffrance.

Roman – Ed. Viviane Hamy
256 pages – 19 €


Souvenirs d’un Lille ancien

d’Hervé LEPEE

Très richement illustré de près de 400 photographies et autres documents anciens, pour un bon nombre inédits, cet ouvrage propose une flânerie pittoresque dans les rues de Lille au XIXe siècle. Une flânerie bien réelle car évoquée par un habitant de l’époque, mais pourtant déconcertante.

En donnant à lire les manuscrits inédits d’Henri Guermonprez (1815-1892), Hervé Lépée renvoie en effet le lecteur dans un Lille oublié, celui d’avant l’agrandissement de 1858, à l’époque où les faubourgs d’Esquermes, Fives, Moulins et Wazemmes étaient des communes autonomes. Ima-ginez scruter ces gros villages du haut de rempart dont l’essentiel du tracé sera repris par le boulevard de la Liberté. Comme sorties d’une vieille malle oubliée au grenier, toutes les curiosités que recèle cet ouvrage en feront l’indispensable guide pour tous les passionnés de leur ville, les aidant à mieux comprendre l’âme du peuple lillois.

« Souvenirs d’un Lille ancien » d’Hervé LEPEE
Ed Invenit – 35 €

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