Huissier… C’est un beau métier !

“C’est mon huissier préféré”, dit à son sujet Me Eric Dupond-Moretti.  Avec une telle mise en bouche, on comprend très vite que Jacques Geesen n’a pas été un homme de loi comme les autres.

Bien sûr un huissier suscite toujours une certaine méfiance, mais page 18, il nous apprend qu’a l’âge de dix ans, il a entendu le cri de détresse de l’Abbé Pierre, alors j’en suis sûr, il y a beaucoup d’humanité dans notre personnage.

Huissier de justice à Lille pendant trente ans, Jacques Geesen est sorti de son silence pour nous raconter un peu de l’histoire et beaucoup des dessous de ce métier mal-aimé des Français.

Un livre passionnant et bourré d’anecdotes.

Il arrive, de temps en temps, que même un huissier expérimenté soit pris au dépourvu.

Les constats d’adultère
Les vaudevilles classiques et comédies de boulevard avec portes qui claquent et amants dans les placards sont le lot des huissiers audienciers.Personnellement, je faisais une dizaine de ces fameux « brevets de cocu » chaque mois entre 6 et 7 heures du matin, l’heure où le repos des amants devient nécessaire. Mais de temps en temps, la réalité dépasse la fiction…

QUI C’EST… ? C’est L’Huissier.

Les femmes sont souvent les plus habiles à se cacher pour éviter d’être prises en flagrant délit. L’une se cachera dans la cave sous un tas de charbon, une autre ira se mettre sur une étroite gouttière, une troisième dans un grenier. Si les femmes sont habiles, les hommes sont plus sportifs et n’hésitent pas à sauter par la fenêtre, même du deuxième étage ou escalader de terrasses en terrasses.

Le couple à trois

Mon mari me trompe, il a ses habitudes, faites ce qu’il faut.

Six heures, personne ne répond, le serrurier opère, je m’apprête à constater. Le mari infidèle était au lit avec un autre monsieur. Surprise, le mari volage portait des portes jarretelles et un soutien gorge. Belle affaire, l’avocat de la plaignante est confiant et lui recommande, si l’envie lui prenait de se venger de faire ça de l’autre coté de la frontière à l’abri des huissiers Français. Deux mois plus tard, l’avocat du mari reçoit un constat d’adultère concernant son épouse en faute, à Lille,  mais avec l’amant du monsieur. Imbroglio comiquo courtelinesque, la meilleure solution : s’arranger à l’amiable.

La malle pleine de moines

Un jour de 1997, je suis chargé d’expulser une artiste du Vieux Lille. Elle a du talent mais la lithographie se vend mal, les loyers ne sont plus payés, le propriétaire aimerait récupérer son immeuble le plus vite possible.

Plusieurs étages à déménager, il faudra six gros bras et quatre camions. Une affaire qui à coûté une certaine somme. La locataire, désemparée, avait réussi à trouver chez un de ses amis, un local pour entreposer tout son matériel.

Le deuxième jour, nous arrivons au grenier et nous tombons sur une immense malle

que les déménageurs eurent bien du mal à descendre par l’escalier en colimaçon.

Je la fais ouvrir pour en faire l’inventaire, stupéfaction, elle contenait quatre squelettes plus ou moins bien conservés. J’étais bien ennuyé, le procureur aussi.

« Faites un rapport et transportez les à l’institut medico légal, exigez un reçu et un descriptif ». Sur ce, l’artiste arrive :

-Mes moines ! vous avez pris mes moines ! Rendez moi mes moines…

Selon elle, ils avaient été entreposés provisoirement chez elle par un curé de l’église Saint Joseph de la rue Gantois, avant sa démolition, en attendant de leur trouver une sépulture définitive.

Entre temps, le curé était parti au ciel, sans ses moines.

Épilogue : Quelques années plus tard, quelle n’a pas été ma surprise ! En étudiant le compte rendu financier de la ville de Lille, je lis que madame Martine Aubry avait fait voter une subvention pour enterrer ces braves hommes au cimetière du Sud, trouvant enfin une sépulture, espérons-le, définitive. Si un lecteur a de plus amples renseignements sur les moines inconnus, les colonnes de La Gazette lui sont ouvertes.

L’accordéon du malheur

J’avais été obligé de faire saisir un brave garçon qui se trouvait dans une impasse financière. Il y avait un accordéon, juridiquement, il était saisissable, mais devant le désarroi du jeune homme voyant partir ce souvenir de son grand père, j’ai fermé les yeux. Cela fait une bonne vingtaine d’année, que l’instrument attend toujours dans un carton, son propriétaire. Je le regarde de temps en temps et revois la détresse du jeune homme.

Un livre de Jacques GEESEN

Me Geesen est aussi l’auteur de «L’Abbé des anges» paru en 2017

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