Lille Aux Écrits, Votre Communauté pour Écrire Ensemble.
Lille Aux Écrits est une association née de l’envie de partager la passion de l’écriture. Ce qui a commencé par un défi informel est devenu une communauté dynamique, officiellement créée en juin 2024.
Nous offrons un espace d’entraide et d’émulation où des dizaines de membres se retrouvent partagent leurs écrits et progressent ensemble. Nous organisons des rencontres regulières, des ateliers, et créons des ressources pour tous les niveaux.
Si vous souhaitez écrire et cherchez une communauté ouverte et respectueuse, rejoignez nos «write-in» ! Suivez-nous sur les réseaux sociaux pour ne rien manquer.
Texte proposé par Association Lille Aux Écrits :
La Place aux Silences
« Je n’avais pas de but. Je marchais pour fuir, avec ce besoin de m’effacer. Fuir les attentes trop lourdes, la honte d’un retour précipité. Fuir ma mère, mes erreurs, moi-même… J’errais dans Lille que je ne voulais pas aimer, comme on traverse un chagrin: à pas lents, le regard flou. J’aurais voulu disparaître, me fondre dans les murs, dans l’asphalte, dans la pluie.
Les rues me semblaient grises. Plus ternes encore que mon coeur. Rien ne ressemblait à Vienne – ni la lumière, ni les voix, ni les visages. Je traînais mon vide entre les façades. Le cœur froissé, les souvenirs encore accrochés aux cils. Tout ici me rappelait ce que je n’étais plus: la jeune femme forte, brillante, curieuse que j’avais cru devenir.
Là-bas, j’avais cru m’épanouir. Mais l’envers du rêve m’avait brûlée. Et le retour, brutal, m’avait laissée à nu. La façade trop fine s’était effondrée, et je n’étais plus qu’un vide ambulant, glissant entre les pavés mouillés.
Je ne savais pas où j’allais, mais c’est là que je l’ai trouvée. Ou plutôt, c’est elle qui m’a trouvée.
Une place oubliée, hors du temps et du monde. Entre deux rues sans charme, elle m’attendait.
Comme une faille. Immobile, effacée. Elle n’avait rien d’extraordinaire. Ni trop grande, ni trop étroite. Elle semblait inintéressante, juste assez pour que personne ne s’y arrête.
On aurait dit qu’elle n’existait que pour ceux qui n’avaient plus nulle part où aller. Elle ne portait aucun nom, seulement des traces de vie.
Un arbre tordu tenait tête au ciel. Un banc déformé avec une fontaine muette au centre de la place. Et il y avait ce souffle, 1mpercept1ble, comme une voix qui chuchote sans parler.
J’ai cru l’inventer, mais elle était bien là. Silencieuse. Et dans ce silence, quelque chose m’a reconnue. Elle m’a laissée m’écrouler sans honte. Me replier. Redevenir floue.
Pour la première fois depuis des semaines, mon corps s’est posé. Mes pensées ont cessé de courir et Je l’ai entendue. Non pas avec les oreilles, mais avec cette partie de moi gui n’avait pas encore disparu. Elle ne m’a pas jugée. Elle m’a simplement accueillie en son sein, comme si elle m’attendait. Comme si d’autres, avant moi, s’étaient assis là pour oublier qu’ils existaient. Pour se permettre, juste un instant, d’être, sans devoir devenir.
Je suis revenue, souvent. D’abord sans oser la regarder. Puis avec cette affection discrète que l’on offre à une vieille amie.
Sans un bruit.
Et chaque fois, je déposais un morceau de moi que je n’avais su nommer.
Peu à peu, la ville a lentement changer d’allure. Elle a repris des couleurs. Les pavés m’ont semblé moins durs. Les regards, moins étrangers. Et puis un Jour, les voix sont devenues des échos familiers. Les visages ont cessé d’être menaçants. Et quelque part, entre deux pas, j’ai commencé à me reconnaitre.
Je ne sais pas si cette place existe pour les autres. Mais moi, je la garde au creux du cœur.
Comme un secret.
Un lieu où je me suis oubliée... pour enfin me retrouver. »
CERISE