Répu (blique)

Ça caille. Les joues rougies tranchent avec le fluo des gilets. Rouge-froid. Rouge-colère. J’frissonne, et j’suis pas rassuré à l’idée de me nicher sous ma capuche et mon col roulé. Ça ferait de moi un suspect.

Les lois changent, et servent toujours ceux qui les font. Faut dire que Répu est saturée de flics, et jouer au con c’est risquer de jouer les borgnes, alors j’garde l’œil ouvert. La préfecture est encerclée par 24 cars de CRS, quelques motards patrouillent, et des mecs plastronnés sont en faction sur des pas-de-portes. Y a d’autres relais dès l’entrée de la rue du Molinel qui seront là pour accueillir le cortège. Belle époque de la liberté, des hommes en noir, une femme, brassards, armes, attendent les débordements. Semblent plus agiles. Ça sent le pied léger. Eux ont une capuche, et ont remonté leur col roulé. La peur est dans mon camp.

Place de la République

Les quelques gilets jaunes qui bravent encore le froid piétinent l’inscription qui tourne le dos à la préfecture en attendant que ça bouge : « Tous les êtres humains naissent libres… » etc, on connaît la chanson. La foule éparse est prise en étau entre la préfecture et le Palais des beaux-arts. Le pouvoir et la culture se regardent droit dans les yeux, et ignorent les tentatives de slogans criés à la va-vite un peu plus bas.On sent dans les traits tirés des manifestants l’envie que ça se termine enfin après ces longues semaines, mais ils se savent pris au piège d’une lutte qu’ils ne se voient pas abandonner, et le cratère vide de Répu qui ne sert pas de forum marque leur point de non-retour.

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