Charlie


Une page spéciale pour Charlie ?
Oui, ça me paraît naturel ; on a vécu un cauchemar et plus on parlera, écrira, mieux on  pourra échanger nos opinions et agir.

Vous avez participé à la manifestation lilloise ?
Oui, ça paraissait une évidence, une obligation, un besoin.

Vous lisiez Charlie Hebdo ?
Non, j’ai arrêté depuis longtemps mais j’ai « les 20 ans » un ouvrage qui rassemble plus de 1000 dessins publiés entre 1992 et 2012. Etudiant dans une France d’avant 1968 pleine d’interdits, je lisais Hara-Kiri, « le journal bête et méchant » de Cavanna et du professeur Choron. C’était irrévérencieux et ça excitait ma libido ! Puis, après leur interdiction en 1969  suite à leur titre « Bal tragique à Colombey : 1 mort ! », Charlie Hebdo a pris la relève. La provoc est devenue progressivement différente. Les ventes ont baissé et le journal a disparu en 1982.

Charlie Hebdo est donc une résurrection ?
Oui, dix ans après, Charlie est réapparu  à l’initiative de Val, Cabu et Wolinski. L’ambiance « amicale » était quand même tendue ; Delfel de Ton quitte rapidement le journal ; il y a eu des affrontements judicaires entre Choron et Cavanna ; en 2008, Philippe Val licencie Siné pour antisémitisme suite à l’article sur le fils de Sarkozy. Siné  fait condamner Charlie et  crée « Siné Hebdo »qui devient mensuel. En 2009, Philippe Val est promu patron de France Inter et Charb devient rédacteur en chef de Charlie….

Pas facile de gérer un journal satirique ?
Non, presqu’impossible ! Les auteurs sont difficilement cadrables et c’est aussi ce qui fait leur force et leur intérêt ; le compromis entre eux n’est certainement pas facile, les ambitions et les égos sont différents. Il suffit de lire les articles et les interviews entre eux avant le massacre ! Les lecteurs sont aussi peu nombreux et dispersés ; les journaux satiriques, à l’exception peut-être du « Canard Enchaîné », ne trouvent pas d’équilibre financier. Charlie et Siné ont de réelles difficultés.

L’impertinence et la violence du dessin ont-elles toujours existé ?
Oui, l’objectif, en général, est de cogner sur les puissants et de défendre la liberté et l’égalité. Aux siècles précédents, ils étaient anticléricaux et antimonarchiques. Le plus connu est « le Charivari » créé par Charles Philippon resté célèbre avec sa caricature en poire de Louis Philippe. Les poires couvriront rapidement les murs de Paris ; à l’époque, les sanctions judiciaires étaient nombreuses.

D’autres exemples ?
Oui, il y a eu « l’assiette au beurre » un journal irrespectueux contre les nantis et les institutions de 1901 à 1936. Siné avait créé « Siné massacre » en 1962/63, un périodique anti-clérical-gaulliste-colonialiste collectionnant les procès. Actuellement, je lis quelquefois l’Echo des savanes ou Fluide glacial mais surtout le Canard enchaîné.

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