Des tourbillons de sable du Sahara

Exister aux yeux de tous

Ensuite, il lui restera à exister aux yeux de tous. Ouais, parce qu’exister, c’est être référencé, et porteur d’un bout de papier qui prouve qu’on respire. Les papiers. Il n’en a peut-être jamais eu. De son périple d’un an et demi qui ricane face à l’imagination morbide ne reste qu’un bout de tissu donné par sa mère avant qu’elle ne quitte ce monde.

Quand il est arrivé, on a fait de lui un majeur, faute de preuve du contraire. Le hic, c’est qu’il est mineur, et qu’ils le savent bien. Mais on ne peut accueillir toute la misère du monde. Du coup il flotte, avec l’étiquette de
“ mijeur ”. Statut bâtard. Pas de papiers, pas d’existence. Pas d’âge non plus. Pas de famille. Pas de repères. Une âme égarée dans une folie ordinaire. Et on devrait croiser les bras, détourner le regard des images qui passent en boucle à la télé, loin de nous, comme si tout ça n’était qu’une gigantesque fable tragique.

Mais j’ai le regard aimanté sur sa réalité, c’est plus fort que moi. Alors j’fais c’que j’peux pour lui. Juste ce pas grand-chose qui lui semble énorme pourtant.

Rien de ce que j’ferai ne gommera subitement ses cauchemars ou ses nuits passées à fixer le plafond parsemé de larmes, de sang qui a coulé, d’eau froide d’une mer pourtant chaude sur les plaquettes pour touristes. Ça n’effacera ni la tristesse ni la souffrance. Ça apaisera. Un peu. Peut-être. Mais j’croiserai pas les bras, ni les doigts, comme s’il fallait juste espérer que le temps lui dessine un horizon.

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