Fernand Duchaussoy

Fernand Duchaussoy
Président de la Ligue de Football du Nord pas de Calais

 

Merci M Duchaussoy d’avoir accepté notre interview pour parler foot, discipline qui rassemble le plus de licenciés.

Vous avez raison, le foot rassemble plus de deux millions de licenciés ; la Ligue du Nord Pas de Calais regroupe  158.000 pratiquants et gère 100.000 matchs par an !

Êtes-vous tombé tout petit dans le chaudron du foot ? 

Oui, comme la plupart des enfants avec un ballon au pied dans les rues de Berck où j’habitais. Mes débuts n’ont pas été très prometteurs. Ma mère, veuve très jeune, me protégeait et craignait que je me blesse. Je me rappelle que j’allais voir au café siège du club si j’étais convoqué pour un match et ça n’arrivait pas…

Vous avez donc arrêté ? 

Non, un ancien instituteur, dirigeant de club, m’avait remarqué  et j’ai intégré l’équipe 1ère au lycée d’Abbeville. L’équipe a atteint un bon niveau amateur.

Et vous avez continué ? 

J’ai dû faire une pause car je suis allé en fac à Lille ; j’ai passé mon CAPES pour être professeur de physique chimie, puis j’ai fait mon service militaire en coopération au Maroc.

J’ai lu aussi que vous avez été comédien ?

Oui, j’ai créé avec un groupe de copains un club de théâtre dont j’ai été le président.

Président, c’est un titre qui vous va bien !  Car, vous avez un parcours hors du commun : vous avez été Président de la Ligue du football amateur, de la Fédération française de football et membre de nombreux organismes sportifs dont le comité olympique…Comment est-ce possible quand on est issu d’une famille modeste et qu’on habite Berck ? 

Les circonstances…Le maire de Rang-du-Fliers, une commune proche de Berck où j’enseignais, avait créé une école de foot ; on jouait dans une pâture. Toujours passionné et pratiquant, j’ai signé ma première licence de dirigeant de club à 35 ans. Enseignant, accompagnant les jeunes joueurs, étant sur le terrain, j’ai été élu au comité directeur du district de la Côte d’Opale dont je suis devenu Président. Du fait de cette élection, je devenais vice-président de la Ligue du Nord Pas de Calais que j’ai présidée après le départ en retraite du responsable.

Et le même scénario a continué ? 

Oui, en qualité de Président de la Ligue nordiste, je devenais, de droit, vice-président de la Ligue nationale du football amateur. En janvier 2005, je suis élu Président pour remplacer Jean-Pierre Escalettes nouveau Président de la Fédération Française de Football et je suis réélu en 2008 avec plus de 98% des voix.

Quel est le rôle de la Fédération de Football ?

La Fédération (FFF) a pour mission le développement de la pratique du football sous toutes ses formes. Elle est responsable des équipes de France, du marketing, des règles. Elle chapeaute  la ligue de football professionnel (LFP) qui gère les championnats professionnels et la  ligue de football amateur (LFA). La LFA a été créée par JP Escalettes pour décharger la Fédération et mieux structurer le football amateur.                                                                                            Ainsi, en qualité de Président de la LFA, je suis devenu deuxième vice- président de la FFF.

Et, les fameux évènements de la coupe du monde de 2010 expliquent votre nomination à la tête de la FFF.

Oui, je n’étais pas programmé pour devenir Président de la Fédération. Dans l’ordre hiérarchique, c’était Frédéric Thiriez, Président de la ligue professionnelle, qui aurait dû assurer l’intérim après la démission du Président. Compte tenu de la grève d’entraînement des joueurs en soutien à Anelka, il ne pouvait assurer l’intérim.

Vous étiez présent à cette coupe du monde en Afrique du Sud ?

Oui, en qualité d’invité. Suite à l’article du journal l’Equipe, Escalettes avait dû exclure Anelka qui avait insulté Domenech dans les vestiaires. Peut-être n’a-t-il pas suffisamment expliqué aux joueurs la sanction mais cette affaire est due en grande partie à une excessive médiatisation comme c’est souvent le cas dans le foot.

Vous voilà donc Président intérimaire, puis Président de la FFF jusqu’à la fin du mandat d’Escalettes

Oui, ça n’a pas été facile. Je me trouvais avec un conseil qui n’avait pas été élu pour moi ; je devais licencier l’entraîneur, prendre des sanctions contre les joueurs…

Et vous avez la volonté de rénover l’instance

Oui, après ce mondial catastrophique, c’était une nécessité. Des décisions importantes ont été adoptées : les droits de vote du monde professionnel sont passés de 25 à 37% à l’assemblée générale ; la composition de la direction a été modifiée, elle est constituée dorénavant d’un président et dix membres élus au scrutin de liste ; enfin, la contribution financière de 2,5% des droits télé et des recettes des paris sportifs versée au foot amateur a été pérennisée.   

En 2011, vous représentez la FFF lors de la réélection de Sepp Blatter.

Oui, j’ai voté pour lui ; c’était la décision du comité exécutif de la fédération ; Sepp Blatter avait un réel charisme et était apprécié de très nombreuses fédérations. à la FIFA, j’étais membre de la commission de développement où j’ai défendu en particulier l’assistance vidéo. C’était un monde nouveau et étonnant pour moi ; dès mon arrivée, j’ai eu droit à un costume sur mesure, une première !

Le choix des pays organisateurs de coupe de foot est-il transparent ?

Un excellent dossier n’est pas suffisant ; les enjeux sont considérables et les influences politiques ou autres pèsent. J’ai participé à la désignation de la France pour l’Euro 2016. Notre dossier était bon mais l’appui de Platini a été décisif face à la bonne candidature de la Turquie.

S’agissant des matchs, les décisions arbitrales sont souvent contestées et le comportement des joueurs pas toujours exemplaires. Un seul arbitre français, Clément Turpin, fait partie de la liste Elite de l’UEFA et va arbitrer des matchs de l’Euro. Vous avez aussi résisté à la pression des arbitres qui souhaitaient avoir plus d’avantages financiers.  

Vous avez en partie raison ; il y a trop de contestation et de
simulation. Cela étant, quand un arbitre français arbitre des matchs de la FIFA et de l’UEFA, ça se passe bien ; en réalité ils sont desservis par les matchs nationaux où l’on a tendance à être trop laxiste. Attention aussi à la médiatisation de tous les gestes des joueurs dans ce foot spectacle professionnel. Quant à la rémunération des arbitres, j’ai estimé lors de mon mandat qu’elle était acceptable et je précise que les arbitres français ont un statut amateur.

En 2011, vous vous représentez à la présidence de la FFF.

Oui et je suis battu par Noël Le Graët ; j’obtiens avec ma liste 45,5%. Celui qui est aux affaires en période de crise prend en général tous les mauvais coups. Le Graët, ancien dirigeant de Guingamp et trésorier de la FFF, avait avec lui tous les clubs professionnels et une partie des amateurs où le sentiment de rester groupé dans une élection n’est pas ressenti avec la même force.

En Octobre 2012, vous reprenez du service en étant de nouveau élu Président de la Ligue du Nord Pas de Calais de football.

Je me suis présenté contre le président sortant qui avait voté contre moi en 2011 ; c’est une première car jusqu’à présent j’avais succédé à un partant. La Ligue a un rôle essentiel. Elle incite et aide les clubs à mieux se structurer et elle organise les compétitions masculines et féminines entre les clubs amateurs des deux départements quelle que soit la catégorie d’âge. Cela va des premiers tours de la Coupe de France  aux compétitions promotions d’honneur des moins de quinze ans. Compte tenu du nombre de pratiquants, plus de 158.000, du nombre de bénévoles, plus de18.500, les actions menées par la Ligue touchent aussi bien le projet sportif que le projet éducatif. Partager les règles de vie et les règles du jeu est un exercice important dans le mieux vivre ensemble. La pratique du foot est un formidable creuset social ; bien sûr, il y a des incidents, des incivilités mais cela représente moins de 2% des matchs. Et, naturellement, les médias en font une belle caisse de résonnance et oublient de parler de sa contribution  importante dans l’intégration. La Ligue est aussi depuis octobre 2013 un centre interrégional de formation agréé à l’attention des éducateurs, entraîneurs, arbitres et dirigeants

Où en est l’évolution du foot féminin ?

On constate une forte progression depuis cinq ans ; il y a actuellement plus de 2.77O licenciées et environ 50 clubs.

Avec l’Euro 2016, la Ligue participe aussi au projet « Horizon Bleu 2016 »

Le financement de ce projet est la continuité de la décision prise en 1998 lors de la coupe du monde en France de faire bénéficier le foot amateur d’une partie des bénéfices de l’évènement. Ainsi, la FFF, avec l’Euro, a mobilisé une enveloppe financière importante de 37 millions d’euros à répartir sur trois thématiques : les infrastructures en accompagnant les projets d’équipements des clubs amateurs, la formation en faveur des éducateurs et des permanents et les animations autour de l’Euro 2016. Au niveau de la Ligue, nous avons organisé une tournée avec un bus dans 60 sites et nous avons été reçus magnifiquement dans tous les quartiers y compris ceux considérés comme difficiles. Le foot attire, rassemble et intègre. Notre programme éducatif fédéral qui vise à l’apprentissage des règles de vie et de jeu rentre aussi dans cet objectif de capitaliser les vertus éducatives du foot.

Vous êtes donc un Président heureux et fort occupé et je vous remercie de votre accueil.

Merci à vous aussi de vous intéresser au foot et c’est vrai, je vais être très occupé par la fusion de notre Ligue avec celle de Picardie.

 

La gazette avait une forte envie d’ouvrir une rubrique sport

Jean-Pierre Delletrez, ancien responsable de La Voix des Sports, lui conseilla de prendre l’attache de M Duchaussoy, la personne qui connait le mieux le monde du football. Toujours aussi chanceuse, la Gazette obtint un rendez-vous rapide surtout à un moment où l’Euro 2016 est dans l’esprit de tous les passionnés de foot.

 

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